La responsabilité professionnelle d’un avocat est recherchée par la partie adverse qui réclame sa condamnation aux frais, notamment d’expertise, qu’elle a dû exposer dans une instance introduite contre elle au nom d’une société qui finalement n’avait aucune existence légale.
L’article 3 de la loi du 31 décembre 1971 définit l’avocat comme auxiliaire de justice et c’est sur ce visa que l’avocat se trouve condamné. Il doit s’assurer de l’identité de l’existence de son mandant. Il est donc responsable « même envers la partie adverse, de toute carence préjudiciable ».
Cass. Civ. 1ère 26 septembre 2012 n° 11-16959.
Un arrêt de la Cour de Cassation exonère l’avocat de toute responsabilité à l’égard de son adversaire.
Celui-ci était le CHU de Pointe-à-Pitre. Pour que son pourvoi en cassation soit recevable il avait exécuté un arrêt et payé des indemnités à son adversaire. Toutefois celui-ci étant devenu insolvable, le Centre hospitalier ne pouvait récupérer les fonds. Il imagine alors d’engager la responsabilité de l’avocat de son adversaire en soutenant qu’il n’avait payé les indemnités mises à sa charge que sur l’affirmation de ce dernier qu’il conserverait les fonds séquestrés sur son compte.
La Cour de Cassation rappelle que si l’avocat est tenu à l’égard de la partie adverse d’une conduite loyale, il n’a pas à prendre l’initiative de lui délivrer des informations ou des conseils.
Cass. 1ère Civ. 26 septembre 2012 n° 11-20259.
Faute civile de l’avocat, « Les avocats déchargés du devoir d’anticipation »
C’est le titre d’une chronique de H. Slim, in JCP 2012, 169. Il s’agit d’un commentaire d’un arrêt Cass 1ère Civ. 15 décembre 2011 n° 10-24550.
Voici le sommaire de cet article :
Après avoir mis à la charge des avocats le devoir d’anticiper les évolutions prévisibles du droit positif, la Cour de Cassation apporte une nette limite à sa jurisprudence antérieure en précisant que la responsabilité de ces derniers ne peut s’apprécier qu’au regard du droit positif existant à l’époque de leur intervention. Le soulagement qu’apporte l’arrêt du 15 décembre 2011 ne devrait toutefois pas être surestimé.
On a encore en mémoire l’arrêt fort commenté de Cass. 1ère Civ. 14 mai 2009 n° 08-15899 où l’avocat devait non seulement appliquer le droit positif mais aussi une jurisprudence dont l’évolution était prévisible. L’attendu était exactement celui-ci : l’avocat « se doit de faire valoir une évolution jurisprudentielle acquise dont la transposition ou l’extension à la cause dont il a la charge a des chances sérieuses de prospérer ».
« La mauvaise foi du client exonère l’avocat de toute responsabilité »
Cass. 1ère Civ. 31 octobre 2012, n° 11-15529 sera publié au Bulletin.
Cet arrêt est commenté par Y. Avril in Gaz. Pal. Du 9 décembre 2012 p. 15.
L’avocat n’est pas tenu d’attirer l’attention de son client sur les conséquences d’une fausse déclaration dès lors que l’obligation de loyauté et de sincérité s’impose en matière contractuelle et que nul ne saurait voir sa responsabilité engagée pour n’avoir pas à rappeler à une partie ce principe de bonne foi élémentaire où les conséquences de sa transgression. Le juge peut décider qu’aucun manquement n’est imputable à l’avocat.
Perte de chance par la faute de l’avocat
Un arrêt à publier au Bulletin traduit un infléchissement de la jurisprudence.
La Cour de Cassation censure une Cour d’Appel qui avait refusé toute indemnisation de son préjudice à la victime d’un avocat. La Cour d’Appel avait estimé que « la perte de la chance alléguée paraissait faible ». En conséquence elle n’avait indemnisé que les frais de procédure engagés en pure perte.
La Cour de Cassation est d’un avis contraire : « la perte certaine d’une chance même faible, est indemnisable ». Cass. 1ère Civ., 16 janvier 2013, n° 12 – 14439 (D. Actu. 2013, 243 obs. Gallmeister).
Préjudice par la faute de l’avocat
Pour triompher dans l’action en responsabilité contre l’avocat, la victime doit prouver que son préjudice est définitif.
Un avocat n’avait pas constitué pour une banque les sûretés prévues en garantie de remboursement d’un prêt. Il était fautif.
Toutefois rien ne prouvait que la créance chirographaire de la banque ne serait pas, au moins partiellement, désintéressée. Faute de justifier un préjudice certain, la banque est déboutée de son action en responsabilité.
(Cass. 1ère Civ., 16 janvier 2003, n° 11-24250).
Cass. 1ère Civ. 14 novembre 2012 n° 11-24396.
La Cour de Cassation avalise la solution d’une Cour d’Appel en rejetant le pourvoi.
Elle rappelle que le point de départ du délai de prescription en matière de responsabilité d’un avocat est la date de la fin de sa mission et non pas celle du jour où le dommage s’est révélé.
A partir du moment où la Cour d’Appel, au vu des éléments qui lui sont soumis, fixe la fin de la mission, le délai de cinq ans commence à courir.
De façon préventive, on ne saurait trop attirer l’attention des avocats sur l’utilité de formaliser la fin de la mission, par exemple en écrivant au client, en lui soumettant un questionnaire de satisfaction lorsque le Cabinet est certifié ISO, ou en lui restituant les pièces du dossier avec une lettre circonstanciée.
Le juge ne peut rejeter une demande de renvoi fondée sur l’article 47 du Code de procédure civile dès lors que les conditions d’application sont remplies (Cass. 2ème Civ., 6 janvier 2012, n° 10-27998, sera publié au bulletin).
Un avocat de Saint Gaudens avait demandé au Premier Président de la Cour d’appel de Toulouse de suspendre l’exécution provisoire d’une ordonnance de Référé rendue à son encontre. Elle demandait le renvoi devant le Premier Président d’une Cour d’appel limitrophe.
La Cour d’appel n’avait pas fait droit à sa demande en considérant que celle-ci était irrecevable faute d’avoir soulevé le moindre moyen.
Au visa de l’article 47 du Code de procédure civile la décision est cassée et renvoyée devant la Cour de Pau.
Les lettres simples adressées au client : un mode de preuve de l’accomplissement de l’obligation d’information de l’avocat. Cour d’Amiens, Ch. Civ., 1er mars 2012-018433.
La preuve des faits juridiques n’est pas sanctionnée par le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même (Cass. 3ème Civ. 3 mars 2010, Bull. Civ. 2010, III n° 52 ; Cass. Com. 19 juin 2012 n° 11- 17015, inédit).
La preuve de l’accomplissement par l’avocat de son obligation d’information constitue un fait juridique qui relève de l’appréciation souveraine des juges du fond et peut donc être faite par tout moyen.
1°) Cass. 1ère Civ. 30 septembre 2010, n° 09-67298, D. 2010, Actu. 2289.
2°) Cass 1ère Civ. 8 mars 2012, n° 11-14811, D. Actu 2012, 735.
C.A. Paris, Pôle 2, Chambre 1, 10 octobre 2012, n° 11/10684 (disponible sur Légifrance).
Article 11.5 du R.I.N.
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Aubert Jean-Luc, La responsabilité civile des Notaires, Paris, Defrenois 2008.
Avril Yves, La responsabilité des avocats, civile, disciplinaire, pénale, Paris Dalloz Référence 2008. (Lien vers la nouvelle édition 2016)
Code de Déontologie, Ordre des avocats de Paris annoté par Thierry Rivet, Paris Lamy 2012.
Guide de l’avocat, Lamy 2011.
Le Tourneau Philippe, Droit de la responsabilité et des contrats, Paris, Dalloz Action, 2012-201
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Article publié sur ce site le 03.01.2023
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