Lorsqu’une réclamation est faite à un avocat, ou au Barreau dont il dépend, elle doit être déclarée à l’assureur. Celui-ci a souvent inséré dans la police une clause indiquant que la déclaration de sinistre est valablement faite au courtier, la Société AON pour le Barreau de Paris, la Société de Courtage des Barreaux pour la majorité des barreaux de province.
Ici une société impute à l’avocat une faute engendrant sa responsabilité pour un préjudice chiffré à 2.998.177,89 euros.
La Société réclamante avait correspondu avec la Société de Courtage des Barreaux qui avait entrepris d’instruire la réclamation. La fin de la mission de l’avocat faisait courir la prescription (art. 2225 du Code civil) le 25 février 2015. L’assignation en responsabilité était du 16 juin 2020, soit cinq ans et cinq mois après la fin de la mission.
Pour tenter d’échapper à la prescription la société réclamante invoquait la suspension de la prescription au sens des dispositions de l’article 2238 du Code civil sur l’impossibilité d’agir.
La Société se fondait sur la désinvolture de la Société de Courtage des Barreaux, qui après avoir fait valoir qu’elle était la seule interlocutrice, avait écrit le 23 janvier 2017 qu’elle n’était plus en charge du dossier et qu’il était repris par la Société Allianz. Dès lors la prescription aurait été interrompue du 25 février 2015 au 23 janvier 2017, période pendant laquelle le courtier était censé instruire le sinistre.
L’attendu décisif qui retient que l’action est prescrite est le suivant :
« La Société ne justifie d’aucun moyen de droit utile de nature à établir en quoi les éventuelles affirmations, explicatives et/ou atermoiements de la Société de Courtage des Barreaux (SCB) dans ses divers courriers, même à être considérés de mauvaise foi, étaient de nature à interdire son action indemnitaire contre Maître X… et la SARL Y…, la SCB n’étant pas les représentants de ces dernières ».
Il restera à vérifier si cet arrêt est porté devant la Cour de cassation. Face à la conduite de la Société de Courtage des Barreaux, une cour d’appel a considéré que « la prescription avait été interrompue pendant 29 mois, du 11 octobre 2010 au 15 mars 2013 » (CA Poitiers, 1ère Ch., 18 juin 2018, n° RG 17/00899). Ces 29 mois correspondaient à « l’instruction » du sinistre par la SCB, qui se flatte de « la prise en charge rapide des réclamations »… « pour une bonne image de la profession ».