Cette décision est relatée de façon détaillée dans la Gazette du Palais des 20 et 21 mai 2015, p. 30 et 31.
Elle est commentée par Guillaume Royer dans LEXBASE, la lettre juridique n° 613 du 21 mai 2015.
Le demandeur est l’avocat de Madame Borrel, veuve du juge français Bernard Borrel, retrouvé mort le 19 octobre 1995 à 80 kms de la Ville de Djibouti.
Sur un recours formé par l’avocat la Cour d’appel de Paris annula une ordonnance des juges d’instruction refusant d’organiser une reconstitution des faits sur les lieux en présence des parties civiles et les dessaisit du dossier.
L’avocat et un de ses confrères adressaient une lettre au Garde des Sceaux et reprenaient cette lettre devant des journalistes du Journal le Monde.
Dans cet article il était écrit que les avocats de Mme Borrel avaient « vivement » mis en cause le Juge auprès de la Garde des Sceaux, en l’accusant notamment d’avoir « un comportement parfaitement contraire aux principes d’impartialité et de loyauté ».
L’article poursuivait en citant intégralement le texte du « mot manuscrit et assez familier » adressé par le Procureur de Djibouti à la Juge, lequel démontrait selon les avocats, « l’étendue de la connivence (existant) entre le Procureur de Djibouti et les magistrats français ».
A la suite d’une plainte pour diffamation publique envers un fonctionnaire public, l’avocat était déclaré coupable de complicité du délit de diffamation envers un fonctionnaire public. Après un arrêt de cassation le pourvoi de l’avocat était rejeté.
Les critiques de l’avocat sur la composition de la Cour de cassation sont rejetées. En revanche il est fait droit à sa demande sur le plan de la liberté d’expression et d’une violation de l’article 10 de la Convention européennes des droits de l’Homme.
Contrairement à ce que soutiennent les instances représentatives des barreaux la Cour européenne se refuse à assimiler l’avocat à un journaliste. De même la Cour ne voit pas dans quelle mesure les déclarations de l’avocat pouvaient directement participer à sa mission de défense puisque l’instruction se poursuivait devant un autre juge qui n’était pas mis en cause.
Néanmoins la Cour européenne considère qu’un avocat doit pouvoir attirer l’attention du public sur d’éventuels dysfonctionnements judiciaires, l’autorité judiciaire pouvant tirer un bénéfice d’une critique constructive.
Enfin on ne peut considérer que la condamnation de l’avocat aurait été de nature à préserver l’autorité du pouvoir judiciaire. Le bon fonctionnement des tribunaux ne saurait être possible sans des relations fondées sur la considération et le respect mutuel entre les différents acteurs de la Justice, au premier rang desquels les magistrats et les avocats.