Cet arrêt écarte, pour la première fois à notre connaissance, un moyen soulevant l’illégalité, au regard de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, de dispositions de la législation professionnelle nationale sur l’inscription au Tableau.
Les articles 11-4, 17-1 et 3 de la loi du 31 décembre 1971 sont ici appliqués – l’article 3 est relatif à la formule du serment : « Je jure, comme avocat, d’exercer mes fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité ». L’article 11-4 exige, pour l’avocat, de « n’avoir pas été l’auteur de faits ayant donné lieu à une condamnation pénale pour agissements contraires à l’honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs ». L’article 17-1 donne pouvoir au Conseil de l’Ordre de statuer sur l’inscription au Tableau des avocats.
Une personne avait soulevé l’illégalité de ces textes. Condamnée pénalement, elle voulait faire juger que leur application, entraînant un refus d’inscription, constituait une double peine.
La Cour d’appel juge qu’il n’en est rien, mais pour autant, n’applique pas mécaniquement l’effet de plusieurs condamnations pénales définitives traduisant des comportements totalement inadaptés au regard des qualités de modération, de dignité et d’honneur attendues des auxiliaires de justice.
Cet arrêt se penche alors sur les éléments de preuve apportés pour caractériser l’amendement de l’intéressé et son aptitude à exercer la profession en conformité avec ses principes essentiels.
Le principe est désormais clair depuis un arrêt de principe de 1997 (Civ. 1ère, 9 décembre 1997, n° 95-17186, Bull. Civ. I, n° 357, p. 241). Il conduisait à admettre l’inscription d’un avocat condamné pour le meurtre de son amie, l’incendie de son appartement et le vol de ses bijoux. Durant son incarcération la personne avait obtenu plusieurs titres universitaires, notamment la licence en droit, puis, après sa libération, avait exercé une activité libérale de rédacteur d’actes juridiques.
Néanmoins la seule réhabilitation serait insuffisante pour permettre l’inscription (Civ. 1ère, 24 janvier 1995, n° 92 – 22056, Bull. Civ. I, n° 48, p. 34).
En définitive l’on ne peut que se louer de cette souplesse, laissant une grande marge d’appréciation au Conseil de l’Ordre puis à la Cour d’appel. Il s’agit certes de juridictions statuant en matière administrative, mais comme en matière disciplinaire elles doivent toujours rester humaines.