La déontologie des magistrats fait parfois l’objet de regards croisés avec celle des avocats.
Ne sont-ils pas tous deux auxiliaires de justice ?
Dans les bonnes feuilles on pourrait citer des études à deux voix :
– E. de LAMAZE, C. PUJALTE. L’avocat, le juge et la déontologie. Préface J.P. MAGENDIE, Avant- propos M. BENICHOU, PUF 2009.
– Les déontologies des professions du droit, quel avenir ? Actes d’un colloque à Montpellier, Lamy 2010.
La Garde des Sceaux a annoncé le 25 avril 2013 au Sénat avoir saisi pour avis le Conseil Supérieur de la
Magistrature dans l’affaire du « mur des cons » du Syndicat de la Magistrature.
Dès le 26 avril la Présidente du Syndicat de la magistrature, au nom du syndicat, a écrit une lettre ouverte
disponible sur www.syndicat-magistrature.org
Disons-le tout net, pour le déontologue, cette lettre est loin de convaincre :
1. Le local du Syndicat est peut-être privé, mais on y reçoit des journalistes. Il ne bénéficie pas de la protection de la vie privée dont toute la force réside dans l’article 9 du Code Civil.
2. Le caractère « privé » est dépourvu de pertinence à partir du moment où les actes privés relèvent également de la discipline des magistrats, comme pour les avocats. Souvenons-nous du magistrat qui avait volé une carte bancaire pour payer une consommation dans une boîte de nuit. Il a été lourdement sanctionné par le Conseil Supérieur de la Magistrature quoique les faits ne soient ni de près ni de loin en rapport avec l’activité professionnelle.
3. Il s’agirait de propos reflétant « l’expression en privé d’une opinion lapidaire et caricaturale »… de « propos satiriques ». Or l’expression constitue assurément une injure. Reportons-nous au Dictionnaire Robert. Le mot « con » est synonyme de « couillon, enflure, enfoiré » et autres qualificatifs choisis.
En outre la contravention d’injures privées existe. Elle se définit comme « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait » (article 29 alinéa 2 de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881).
4. Au plan pénal il resterait à apprécier si l’expression syndicale constitue une véritable excuse. Il resterait également à apprécier si la preuve a été obtenue de façon loyale, le Syndicat parlant de photographie « soustraite ».
5. Sur le plan strictement déontologique, les magistrats ne sont pas tenus par un Code pas plus que les avocats. Il existe en revanche un « Recueil des obligations déontologiques des magistrats » (Dalloz 2010).
Ce recueil a été élaboré au cours des années 2007 à 2010 à la demande du Parlement.
Parmi les meilleurs morceaux, on citera sous la rubrique « La dignité de la personne », « Principe. E2. Le magistrat doit s’abstenir d’utiliser dans ses écrits comme dans ses propos, des expressions ou commentaires déplacés, condescendants, vexatoires ou méprisants ».
Qu’en est-il des insultes ?